Traitement

Nos pratiques actuelles, ce qui est acquis, ce qui est discuté

Les critères d’injection ne sont plus matière à discussion mais qu’en est-il des critères de non ré-injection ? Quel degré d’urgence dans la prise en charge des complications de la DMLA? Quels effets secondaires pour les IVT?

Le 27 février 2014

Nos pratiques actuelles, ce qui est acquis…

Les critères d’injection ne sont plus matière à discussion mais qu’en est-il des critères de non ré-injection ? Le Docteur Rougier distingue deux types de cas. Tout d’abord ce qui n’est pas une dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA)  exsudative avec notamment la choriorétinite séreuse centrale, la dystrophie pseudovitelliforme, les télengiectasies maculaires et les décollements de l’épithélium pigmentaire drusenoides à l’origine d’un syndrome maculaire chez la personne âgée. En cas de doute diagnostique, il faudra s’aider de l’angiographie en recherchant une diffusion, de la tomographie par cohérence optique (OCT) en analysant le respect ou non des lignes de l’épithélium pigmentaire (EP) et des photorécepteurs (PR) et effectuer une surveillance rapprochée des patients. Le deuxième cas de figure correspond aux patients chez qui il n’existe aucun espoir de récupération, comme en présence d’une vaste cicatrice fibreuse, une déchirure de l’EP, une acuité visuelle inférieure à 15 lettres, une inefficacité, une intolérance du traitement ou une mauvaise compliance des patients. Attention aux images pièges en OCT que sont les tubulations de la rétine externe (cavités hypo réflectives avec une bordure hyper réflectives dans un contexte de DMLA exsudative), les pseudokystes rétiniens de la couche nucléaire interne (cavités hypo réflectives sans bordure hyper réflective des DMLA atrophiques traduisant la dégénérescence des cellules de Müller) ou encore la dégénérescence maculaire cystoïde des DMLA exsudatives (cavités hypo réflectives à bords carrés dans la couche nucléaire interne) qui traduisent une souffrance chronique de la rétine sans aucune traduction d’activité angiographique.

Le Professeur Tadayoni fait le point sur le degré d’urgence dans la prise en charge des complications de la DMLA. L’étude LUMIERE a démontré qu’en cas d’exsudation, un traitement par anti-Vacsular Endothelial Growth Factor (anti-VEGF) dans un délai maximal d’une semaine permettait une meilleure récupération visuelle. En cas d’hématome compliquant une DMLA, l’abstention thérapeutique n’a pas sa place. La prise en charge doit être active et comprendra toujours à minima une injection intra vitréenne (IVT) d’anti-VEGF. Le reste du traitement dépendra de critères cliniques et para cliniques avec notamment la réalisation d’une OCT avec des coupes passant par les bords de l’hématome afin de déterminer la part de sang sous l’EP et celle sous rétinienne. Des rétinophotographies couleurs, une angiographie et une échographie B (en cas d’hémorragie intravitrénne associée) viendront compléter le bilan d’imagerie. Un traitement par IVT d’anti-VEGF uniquement est indiqué en cas d’hématome sous l’EP, extrafovéolaire, peu épais, ancien, peu étendu. Un traitement chirurgical sera privilégié en cas d’hématome épais, sous rétinien, récent et associé à une hémorragie intravitréenne. Au mieux le geste chirurgical aura lieu 5 à 7 jours après la survenue de l’hématome et consistera en une vitrectomie, injection de rt-PA sous rétinienne, tamponnement par gaz et IVT d’anti-VEGF. La phase aigüe passée, des IVT d’anti-VEGF mensuelles seront poursuivie.

… ce qui est discuté

L’augmentation du nombre d’IVT réalisées nous fait nous interroger sur leurs possibles effets secondaires, avec notamment les pics d’hypertonie intra oculaire (HTIO). Après une IVT d’anti-VEGF, la pression intraoculaire (PIO) augmente en moyenne jusqu’à un pic de 60mmHg avant de redescendre à nouveau progressivement. Cette HTIO est fonction de la compliance sclérale différente pour chaque patient. Ce pic sera d’autant plus important que le patient a reçu de nombreuses IVT et qu’il possède des antécédents de glaucome. La conduite à tenir préconisée par le Professeur Bron consiste à réaliser une mesure de la PIO avant la première IVT, puis à chaque consultation de suivi. Cette surveillance devra être accrue en cas d’antécédents de glaucome. Un traitement hypotonisant associé préventif peut se discuter en cas de glaucome sévère. Il est également important de privilégier un schéma d’injection à la demande permettant une réduction du nombre total d’IVT.

Les IVT de corticoïdes ont un effet transitoire similaire avec un pic de pression intra oculaire immédiat suivant l’injection plus marqué pour les substances liquides (Kenacort®) que solides (Ozurdex®). En revanche, leurs effets à long terme diffèrent avec une persistance vitréenne plus longue et une diminution de l’outflow trabéculaire à l’origine d’une HTIO plus prolongée. Leurs effets hypertonisants sont généralement réversibles à l’arrêt du traitement. La triamcinolone est l’agent le plus hypertonisant. La conduite à tenir pratique proposée est la même que celle pour les IVT d’anti-VEGF. De même, il ne semble pas y avoir de véritable nécessité de contrôler la PIO à J8 après une IVT. En conclusion, l’HTIO immédiate provoquée par les IVT n’est pas le réel problème en soi. C’est l’HTIO sur le long terme qui est plus menaçante, au-delà de la visite à J8, principalement avec les IVT de corticoïdes. L’hypertonie intra oculaire post-IVT est généralement bien contrôlée par un traitement médical topique mais il faut rester prudent chez les patients glaucomateux évolués ou bénéficiant déjà d’une bithérapie hypotonisante.

Extrait du congrès ARMD 2013 – « Rétine médicale et chirurgicale : 2013, une année charnière ? »

D’après la communication du Professeur BRON, Dijon,  du Docteur ROUGIER, Bordeaux, du Professeur TADAYONI, Paris, et Professeur BODAGHI, Paris.