En première mondiale : les résultats de l’étude Panorama

Le 10 février 2020

Souvenons-nous de cette étude dont les résultats à 1 an ont été présentés à l’ARVO 19 et rapportés dans ces pages : Il s’agit de cas de rétinopathie diabétique non proliférante sévère, et très sévère (47 et 53, donc à fort risque de passage à une forme proliférante), sans OMD, traités par Aflibercept en 5 injections mensuelles, puis q8 ou 3 injections mensuelles, puis une injection q8, puis q16 versus placebo (sham injection).

La question était de savoir si un traitement par anti-VEGF, en l’occurrence de l’Aflibercept, pouvait être bénéfique sur la rétinopathie diabétique vs sham, en l’absence d’indication liée à la présence d’un œdème maculaire. La différence à 1 an était importante avec :

Amélioration de 2 stades ETDRS à 1 an :

  • 15 % des patients sous sham (donc sans injections)
  • 65,2 % des patients en q16 (5,5 IVT)
  • 79,9 % des patients en q8 (8,6 IVT)

Cette amélioration est rapide : la moitié des patients s’améliorent en 3 mois sous traitement.

Lors de la deuxième année, les patients en q16 sont restés en régime fixe, avec donc 3 injections dans l’année, et les patients en q8 sont passés à un régime PRN.  Les patients étaient injectés à la discrétion de l’investigateur sauf si le score DRSS était supérieur ou égal à 35 (rétinopathie diabétique non proliférante modérée).

Il est intéressant de constater que pour les patients en q8, ce stade ETDRS devait être globalement atteint, puisque seulement 1,8 injections ont été faites en moyenne, alors que 6 injections étaient possibles la 2° année.

Plus de 92% des patients qui s’étaient améliorés de 2 stades ETDRS la 1° année ont gardé le bénéfice de leur traitement.

De plus, les groupes traités ont eu statistiquement moins d’OMD durant les 2 ans de l’étude vs sham :

  • 33,1% des patients sous sham (donc sans injections) (dont 25,6 % de cas d’OMD la 1° année)
  • 10,4% des patients en q16 (dont 6,7 % la première année) (7,8 IVT en 2 ans)
  • 13,4% des patients en q8 (dont 8,2 % la première année) (10,3 IVT en 2 ans)

Et statistiquement moins de passage à une forme proliférante dans les groupes traités par Aflibercept vs sham. Même si l’allègement du traitement la 2° année semble diminuer l’effet protecteur :

  • 20,2 % des patients sous sham (dont 11,9 % de cas de prolifération la 1° année)
  • 4,5 % des patients en q16 (7,8 IVT) (dont 1,6 % de cas de prolifération la 1° année)
  • 2,4 % des patients en q8 (10,3 IVT) (pas de cas de prolifération la 1° année !)

La proportion de patients nécessitant une PPR ou une vitrectomie est bien moindre pour les groupes traités avec Aflibercept vs sham :

  • 10,5 % des patients sous sham (14/133)
  • 1,5 % des patients en q16 (2/135)
  • 1,5 % des patients en q8 (2/134)

La tolérance du traitement a été bonne :

Accidents cardiovasculaires (ATPC)

  • 5,3 % des patients sous sham
  • 5,9 % des patients en q16
  • 3 % des patients en q8

Quelques questions restent en suspens :

L’évaluation par le médecin du score DRSS n’était pas optimale. L’examen par un centre de lecture indépendant des décisions des investigateurs du retraitement en PRN suggère un sous traitement la 2ème année. L’ophtalmologiste traitant semble assez optimiste et moins enclin à injecter son patient.

Ces patients étaient globalement mal équilibrés avec une HbA1c > 8,5 dans tous les groupes à l’inclusion. Est-ce-que le traitement ne les pousse pas à faire attention à leur régime ? Nous n’avons pas le résultat de l’HbA1c au cours de l’étude.

De même, cela n’est pas un traitement définitif, mais plutôt, dans l’état actuel de nos connaissances, un traitement suspensif. Nous n’avons pas assez de recul pour affirmer que des injections répétées règlent définitivement le problème. Il faudrait continuer à surveiller ces patients. Le problème est donc la fausse impression de sécurité que ces traitements peuvent générer, avec des patients que l’on perd de vue. Une étude montre que les patients perdus de vue depuis plus de 6 mois sont à risque de complications majeures.

Obeid A et alOutcomes of eyes lost to follow-up with proliferative diabetic retinopathy that received panretinal photocoagulation versus intravitreal anti-vascular endothelial growth factor. Ophthalmology 20196(3):407-13.

Un rationnel émerge de ces études avec, bien sûr, des injections répétées selon le protocole et une surveillance de la périphérie lorsqu’il y a un œdème maculaire diabétique. Cela permet de différer, voire dans certains cas d’éviter une PPR en urgence en cas de rétinopathie diabétique non proliférante sévère, ou de rétinopathie proliférante minime.

En l’absence d’œdème maculaire diabétique, les injections peuvent être entreprises mais la surveillance de ces patients doit être étroite, et il faut s’assurer qu’ils ont bien compris qu’il ne s’agit pas d’un traitement curatif, mais suspensif. Le traitement de la rétinopathie diabétique reste en France la PPR. (Pour le moment)