Gènes

Maladies génétiques de la rétine

Quel est le rôle des gènes dans les maladies de la rétine? Quelle prévention adopter? Explications

Le 28 février 2014

Imagerie de la rétine

La densité des cônes varie dans la rétine, avec un maximum fovéolaire (15 000 cônes/mm²), puis une diminution progressive au fur et à mesure qu’on s’éloigne de la rétine.

dystrophies des cônes

Des équipes ont parlé d’optique adaptative. L’espace entre les cônes et le nombre des cônes est proportionnel à l’acuité visuelle. Une perte de 55% des cônes reste compatible avec une acuité visuelle conservée. Lorsque l’acuité visuelle baisse dans les dystrophies des cônes, la maladie évolue donc depuis longtemps. Peut-être devrait-on proposer des examens avec l’optique adaptative aux personnes génétiquement atteintes, mais non encore symptomatiques ?

choroïdérémie

Dans le choroïdérémie, les femmes conductrices ont une densité des cônes normale. Les patients qui conservent une acuité visuelle centrale ont une densité normale dans l’ilot central. Au pourtour de cet îlot central, les cônes survivent alors même que l’épithélium pigmentaire a disparu. C’est un argument en faveur de l’origine pigmentaire de cette maladie.

La pharmacologie

La progestérone révèle une fonction protectrice des photorécepteurs dans un modèle de souris atteinte de rétinite pigmentaire. Par contre l’acide valproïque dont on parlait depuis un article de Clemson [1] a été décevante : pas de diminution d’une perte des photorécepteurs dans une étude américaine.  Cela confirme deux études anglaises publiées récemment.[2, 3]

1. Clemson, C.M., et al., Therapeutic potential of valproic acid for retinitis pigmentosa. Br J Ophthalmol. 95(1): p. 89-93.

2. Bhalla, S., et al., Long-term follow-up for efficacy and safety of treatment of retinitis pigmentosa with valproic acid. Br J Ophthalmol. 97(7): p. 895-9.

3. Sisk, R.A., Valproic acid treatment may be harmful in non-dominant forms of retinitis pigmentosa. Br J Ophthalmol. 96(8): p. 1154-5.

Les gènes en cause

Le séquençage du génome continue. De nouveaux gènes responsables de maladies génétiques ont été identifiés.

  • ACACB , un gène qui fait partie d’une famille d’enzymes impliquées dans le métabolisme des acides gras, et qui a été impliqué dans la genèse de certaines formes de DMLA est aussi retrouvé pour une forme de rétinite pigmentaire à transmission autosomique récessive.
  • Des mutations du gène MVK ont été identifiées chez des patients porteurs de rétinite pigmentaire à transmission autosomique récessive. Ce gène intervient dans le métabolisme du glucose, et a été reconnu comme responsable de l’acidurie mévalonique.
  • TM2B, qui code pour une protéine exprimée à la fois dans le système nerveux central, et la rétine, a été retrouvé, par l’équipe de l’institut de la vision à Paris, dans la maladie d’Alzheimer  et dans une forme rare d’atteinte de la rétine interne (cellules bipolaires et ganglionnaires).  C’est le type de mutation qui orienterait soit vers une maladie rétinienne, soit vers une maladie d’Alzheimer.
  • TULP3 et SCI sont de nouveaux gènes candidats pour des formes récessives de rétinite pigmentaire
  • Le principal gène de la maladie d’Usher (USH2A) a été retrouvé à Londres chez des patients atteins de rétinite pigmentaire, sans surdité associée.
  • Un possible nouveau gène est à l’étude dans la maladie d’Usher.

Frans Cremers en Hollande propose de réunir tous les gènes connus de maladie génétique de la rétine en une seule banque de données internationale.

De nouveaux syndromes sont identifiés comme

1. Le syndrome de Knobloch avec myopie sévère et atrophie de la choroïde

2. Le syndrome de Tietz, avec mutation du gène MITF (microphthalmia-associated transcription factor)

3. La maladie de Bornholm, avec dystrophie des cônes, anomalie de la vison des couleurs, myopie, baisse d’acuité visuelle, et une rétinite pigmentaire avec inflammation du vitré, neutropénie et splénomégalie.

 Thérapie génique :

Les essais de thérapie génique se multiplient.

  • Dystrophie des cônes et amaurose congénitale de Leber:

Chez les chiens, il faut traiter les chiots, car le traitement à l’âge adulte donne des résultats très limités. Chez l’homme, bien sûr, on n’a pas encore essayé chez des enfants…

L’équipe de Fabienne Rolling à Nantes a montré le succès du traitement de la cone rod dystrophy du teckel à poil long, modèle d’amaurose congénitale de Leber. (gène RPGR1P1)

Des résultats semblables ont été obtenus aux US chez des chiens modèle de rétinite pigmentaire liée à l’X (gène RPGR)

L’équipe du professeur Aguirre aux USA a montré que l’ajout de CNFT (Ciliary neurotrophic factor) à la thérapie génique (qui dédifférencie partiellement les photorécepteurs) permet de traiter des chiens de 2 ans, avec des résultats proches de ceux trouvés chez les chiots.

Un nouveau modèle de chien avec atteinte du gène CNGA3 a aussi bien répondu à la thérapie génique, chez des chiens de 2 ans.

Chez l’homme des essais de thérapie sur le gène RPE65 sont en cours. (dont une étude à Nantes chez le Pr Weber) les résultats sont modestes chez l’adulte, mais les patients ressentent une amélioration subjective. Cependant, la mort des photorécepteurs continue.

  • Maladie de best

Des résultats partiels ont été obtenus chez des chiens (BEST1) et chez des primates. Bientôt des essais chez l’homme.

Les cellules souches

Les cellules souches peuvent venir de sous la peau (cellules souches pluripotentes induites) et être programmées en cellules de l’épithélium pigmentaire, ou de photorécepteurs. On sait déjà produire des bâtonnets. On cherche à produire des cônes. Les cellules de l’EP peuvent être organisées en feuillet pour être implantées à l’homme. Pour l’instant, on les a implantés chez des animaux.

Les rétines artificielles 

Le système Argus 2 second sight a été présenté : amélioration modeste de patients non-voyants.  D’autres études sont en cours.

Les mécanismes dégénératifs

Le suivi de la maladie de Stargadt sera suivi sur la quantification de la surface de l’atrophie par autofluorescence. Certains appareils d’angiographie permettent cette quantification.

La sensibilité à la lumière diminue progressivement avec l’âge dans la choroïdérémie, même si l’acuité visuelle reste stable. Une mesure de la vision des contrastes est nécessaire à l’évaluation de cette maladie.

Dans le rétinoschisis juvénile lié à l’X, le maintien de souris modèles dans une faible lumière permet de diminuer la formation des kystes intra-rétiniens. Faut-il limiter l’exposition des patients à la lumière ?

Le Dr François Paquet Durand (Tübingen Allemagne) a analysé plusieurs lignées d’animaux atteins de rétinite pigmentaire. Il a montré que la mort des photorécepteurs ne suivait pas une apoptose classique. Le stress du réticulum endoplasmique (synthèse des protéines) et des protéasomes (dégradation des protéines) jour un rôle dans la dégénérescence rétinienne, avec une voie de mort cellulaire différente de celle habituelle.

Source : Rapport complémentaire de l’AAO 2013