Première mondiale !

Un oeil humain entier imagé par transparisation et microscopie !

L'équipe du Centre d’Investigation Clinique de l'Hôpital National des 15-20 a imagé par microscopie des yeux humains entiers, transparisés, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour la recherche ophtalmologique.

Le 30 octobre 2023

©MarieDarche_HopitalNationaldes1520

Pour la première fois au monde, un oeil humain entier a été imagé par transparisation et microscopie, une technique initialement développée pour le cerveau, mais jugée jusqu’ici impossible pour l’oeil humain. Cette avancée révolutionnaire découle d’une collaboration scientifique franco-suisse.

Du côté français, les yeux humains ont été transparisés par Marie Darche, Research Engineer (3D histology) (pour la suivre sur LinkedIn, suivez ce lien), membre de l’équipe du Pr Michel Paques, au sein de l’Hôpital National des 15-20.

Du côté suisse, les images ont été obtenues grâce au microscope à feuillet de lumière (le MesoSPIM) du Wyss Center for Bio and Neuroengineering, à Genève.

 

 

Ces résultats sont présentés dans “Light sheet fluorescence microscopy of cleared human eyes”, un article publié le 10 octobre 2023 dans la revue Communication Biology (Nature Journal).

Cette innovation ouvre de nouvelles perspectives pour la compréhension de nombreuses maladies oculaires telles que la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), la myopie ou encore le glaucome, dont les causes restent encore mal comprises.

Qu’est-ce que la transparisation ?

Les tissus qui constituent nos organes existent en 3D. Cependant, leur analyse biologique a historiquement été réalisée en 2D, en découpant des sections de quelques micromètres d’épaisseur pour les imager avec un microscope. Depuis une dizaine d’années seulement, la technologie de transparisation (clearing) a enfin permis d’observer des échantillons en 3D par microscopie.

La transparisation transforme un échantillon biologique initialement opaque en un échantillon transparent. Il est alors possible de voir à travers lui et, grâce à des marquages par anticorps fluorescents et des microscopes spécialisés dans les grands échantillons (microscopes à feuillets de lumière), de visualiser en 3D l’organisation des cellules et des structures de l’organe.

Jusqu’à présent, l’oeil humain était considéré comme l’organe le plus résistant à cette technique en raison de sa complexité, de sa pigmentation et de la fragilité de sa rétine. Il aura fallu plusieurs années à Marie Darche pour adapter la transparisation aux contraintes de l’oeil humain au sein de l’hôpital des 15-20 et de l’Institut de recherche, l’Institut de la Vision.

Cette nouvelle technologie opère un réel changement de paradigme : en rendant l’oeil humain transparent, les chercheurs pourront désormais observer sur les mêmes images des phénomènes localisés, mais aussi la globalité des tissus oculaires, avec leurs architectures cellulaires spécifiques, ou les processus pathologiques de différentes maladies.

©MarieDarche_HopitalNationaldes1520

Qu’est-ce que cette avancée va permettre ?

Pour comprendre l’importance du projet, il faut revenir aux fondamentaux de son développement. Au sein du Centre d’Investigation Clinique (CIC), dirigé par le professeur Paques, des ophtalmologistes, physiciens, informaticiens et biologistes sont rassemblés en un groupe de recherche pluridisciplinaire. Cette approche translationnelle rare, fondée sur une diversité d’acteurs et d’expertises, sert un seul objectif : comprendre l’évolution des maladies oculaires par l’imagerie à haute résolution.

La grande complexité de l’oeil a mené la médecine et la recherche ophtalmologique à se spécialiser dans l’étude de ses tissus isolés, à défaut de l’organe entier. Or, les pathologies oculaires se révèlent souvent multi-tissulaires ou impactant globalement l’oeil (DMLA, glaucome, myopie, etc.). L’imagerie de l’oeil humain entier par transparisation offre une approche plus holistique, en rassemblant les compétences de médecins spécialisés et chercheurs de toutes disciplines autour de l’image 3D d’un seul échantillon, tout en facilitant la comparaison entre images microscopiques et images cliniques.

Une banque des yeux sains et pathologiques imagés au fur et à mesure des travaux sera partagée à la demande avec des collaborateurs internationaux. Un seul échantillon pourra ainsi aider à répondre à de multiples questions scientifiques et enrichir des projets de recherche variés. Cette association d’expériences et de savoirs médicaux, interdisciplinaires et internationaux centrés autour d’une même banque d’images nous aidera dans le futur à mieux comprendre l’évolution des maladies oculaires, à identifier de potentielles cibles thérapeutiques ou à évaluer l’efficacité de traitements novateurs.

Quelles sont les prochaines étapes ?

À ce jour, le projet d’étude publié portait sur des donneurs sains. L’architecture globale des vaisseaux sanguins et nerfs oculaires a ainsi pu être mise en lumière grâce à la transparisation. Avec le soutien d’associations de patients, telles que l’association OVR, et d’organismes de support (subventions internationales, IHU FOReSIGHT), de nombreuses pathologies pourront bientôt être imagées, telles que la DMLA, l’occlusion veineuse rétinienne (OVR), le glaucome ou le mélanome uvéal.

Pour faire avancer nos recherches, l’Hôpital National des 15-20 ambitionne de développer le premier microscope à feuillet de lumière français entièrement dédié à l’imagerie d’échantillons humains. Sa conception naîtra d’une étroite collaboration: les biologistes spécialisés dans la manipulation de l’oeil humain transparisé et les physiciens optiques, supervisés par le Pr Paques, avec l’équipe pluridisciplinaire de la plateforme de microscopie du Wyss Center à Genève.

©MarieDarche_HopitalNationaldes1520

L’Hôpital National des 15-20 entend ainsi conforter sa position tant qu’acteur majeur dans la recherche ophtalmologique, repoussant les limites des connaissances scientifiques et favorisant la collaboration internationale