Pr John Conrath

De l'autre côté du miroir

Rencontre avec le Pr John Conrath, MD, PhD, FEBO, Centre Monticelli Paradis

La vocation de devenir médecin est précoce. John avait 10 ans. L'ophtalmologie s'est révélée à lui plus tardivement, grâce à la lecture du National Geographic et à une interview de S. Fyodorov. Les passions empruntent parfois de curieuses voies...

Le 25 avril 2024

La vocation de devenir médecin est précoce. John avait 10 ans. L’ophtalmologie s’est révélée à lui plus tardivement, grâce à la lecture du National Geographic et à une interview de S. Fyodorov. Les passions empruntent parfois de curieuses voies… Rencontre avec le Pr John Conrath, MD, PhD, FEBO, Centre Monticelli Paradis, passionné par sa profession et… par la Médirerranée.

Pourquoi avoir choisi de devenir ophtalmologiste ? Une vocation ? Le fruit d’une rencontre ? Un hasard ?

John Conrath. Une vocation d’être médecin depuis l’âge de 10 ans. Ensuite pendant mes études je voulais m’orienter vers la médecine interne. Une rencontre avec un chirurgien digestif pour qui j’ai fait des aides opératoires en 4° et 5° année m’a donné envie de soigner les patients avec mes mains : je me suis donc orienté vers une spécialité qui serait à la fois médicale et chirurgicale. Avant d’avoir les résultats du choix filière et région suite au concours de l’internat et de faire le choix de ma spécialité, je lisais un jour la revue National Geographic, dans lequel figurait en novembre 1992 un article sur l’œil, la vision, et les promesses de la chirurgie ophtalmologique. Un interview de S. Fyodorov dans ce numéro m’a marqué. 24 ans après, invité à parler à un congrès à Moscou dans son centre, j’ai pu m’asseoir à son bureau. J’ai fait mon premier choix d’interne en chirurgie dans un service d’ophtalmologie et la passion pour le métier ne m’a pas quittée depuis.

Qu’est-ce qui te passionne le plus dans ton activité au quotidien ?

John Conrath. Recoller des rétines. Tous les décollements de rétine ne se ressemblent pas. Les principes théoriques, énoncés il y a presqu’un siècle par Jules Gonin, sont toujours d’actualité, et il n’y a pas une seule prise en charge qui puisse résoudre tous les problèmes, à l’ère de la vitrectomie microincisionnelle reine. On doit prendre en compte pas seulement l’état de l’œil, mais aussi le patient. Ça reste une maladie malheureusement cécitante dans certains cas, la prise en charge se fait souvent en urgence, l’incidence risque d’augmenter avec l’épidémie actuelle de myopie et les échecs ne sont pas si rares que ça.

Pourquoi avoir rejoint le Centre Monticelli-Paradis/Clinique Juge ? Quelle est la particularité de cette structure ?

John Conrath. Déçu des perspectives administratives et matérielles à l’Hôpital, j’ai voulu rejoindre une structure où je pouvais être co-décisionnaire des choix stratégiques et non subir les contraintes économiques d’un service noyé dans un pôle… J’arrive à offrir à mes patients ce qui se fait de plus « up to date » en rétine médicale et chirurgicale.
La particularité de notre centre est d’avoir une grande activité de recherche clinique concernant les essais de phase 2 et 3 sur des nouvelles molécules explorées dans la prise en charge de la DMLA néovasculaire et atrophique, l’OMD, les OVR… Nous avons 2 ARC plein temps qui nous aident à coordonner cette activité.

Quel événement t’a le plus marqué dans ton activité professionnelle ? Pourquoi ?

John Conrath. L’utilisation du couple visualisation per-opératoire 3D/OCT intégré, en chirurgie vitréo-rétinienne.

Le développement contemporain de ces deux technologies a permis de repousser les limites de ce qu’on peut faire chirurgicalement, en améliorant visibilité du fond d’œil dans des conditions difficiles (myopie forte, DR avec PVR, RD proliférante), avec un grossissement supérieur, une profondeur de champ augmentée (de plus en plus indispensable avec ma presbytie évolutive…), et la possibilité d’améliorer numériquement l’image grâce à des filtres. Par ailleurs la position chirurgie tête haute améliore grandement le confort opératoire.

Un génie apparaît et te propose de faire 3 vœux (professionnels). Quels sont-ils et pourquoi ?

John Conrath. Trouver une pharmacothérapie efficace qui élimine la PVR, pour gagner les 5-10% de décollements multirécidivants qui finissent avec de l’huile de silicone à demeure, ce qui reste un échec chirurgical à mon sens.

Trouver une thérapie régénérative pour les atrophies rétiniennes (géographiques de la DMLA, des dystrophies héréditaires…), pour essayer de faire aussi bien que ce que l’on arrive à faire en pathologie exsudative et répondre aux attentes de nos patients.

Garder la main et la relation médecin/patient privilégiée malgré l’évolution fulgurante de l’IA dans tous les aspects de la vie quotidienne, de Dr Google à ChatGPT…

Mon petit doigt me dit que tu as une passion qui est le paddle. Pourquoi ce sport en particulier ? Vois-tu un lien avec ta profession ?

John Conrath. C’est un sport qui permet d’apprécier la mer d’une façon différente, qui peut être pratiquée de manière très cool ou bien plus sportive entre promenade et course, permettant de découvrir des recoins paradisiaques de notre belle côte méditerranéenne, inaccessibles à pied, et ce de façon écologique avec bilan carbone à 0. On peut y adjoindre facilement le plaisir du snorkeling pour découvrir les fonds marins. Pas de véritable lien avec ma profession, mais indispensable afin de pouvoir déconnecter, pour être en forme et bien travailler.

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Mini bio

John Conrath est ophtalmologiste spécialisé en pathologie vitréo-rétinienne médicale et chirurgicale. Après l’obtention de son doctorat en médecine en 1997 et de son doctorat en sciences en 2004 à Aix-Marseille Université, il a été nommé Professeur à la Faculté de Médecine de Marseille en 2007. Quittant ses fonctions hospitalières et universitaires en 2012, il a ensuite rejoint l’équipe rétine du Centre Monticelli Paradis/Clinique Juge. Son activité clinique et de recherche comprennent la DMLA, l’OMD, les décollements de rétine, la chirurgie maculaire, la prise en charge des corps flottants et depuis 2018 la chirurgie 3D tête haute et l’OCT per-opératoire. Co-investigateur dans de nombreuses études de phase 3, membre de la SFO, de l’ARVO et de l’AAO il est auteur ou co-auteur de 94 publications indexées sur PubMed/Index Medicus.